La peur de manquer est protéiforme. Elle constitue une peur imaginaire dès lors qu’elle échappe à toute logique. C’est d’ailleurs bien souvent ce décalage entre le raisonnement rationnel et l’expression de cette peur qui conduit certains à aller rencontrer un psychothérapeute ou un psychanalyste.
Peur de manquer d’argent, peur de manquer de temps, peur de manquer un événement, peur de manquer d’air, peur de manquer de nourriture, peur de manquer une rencontre… La peur de manquer vient rappeler que le manque est au cœur même de l’expérience humaine, que rien n’est acquis et qu’être comblé, au sens d’une absence de manque, est illusoire.
Ce dernier point est d’ailleurs au principe même de la pulsion, dont la satisfaction ne peut être absolue mais dont la dimension insatisfaite sera précisément celle qui permettra de maintenir vivant le désir. En d’autres termes, c’est parce qu’il y a du manque qu’il y a la possibilité de désirer et que le mouvement de vie continue d’être actif.
La visée d’une psychanalyse n’est donc pas celle d’une disparition du manque mais bien précisément de composer avec le manque, départi de la souffrance qui, pendant des années, à pu lui être rattachée. Cela implique, pour un être, de prendre soin de son désir et d’investir sa libido dans la construction de son existence plutôt que dans les jouissances qui viennent faire diversion. Mais ce choix peut prendre des années à être fait, occasionnant une lutte psychique intense que le divan du psychanalyste sera à même d’accueillir et d’accompagner solidement. Se mettre à l’écoute de ces conflits psychiques qui jusqu’alors pouvaient opérer en sourdine sans connaître par avance le résultat ni même le temps que la traversée prendra demande courage et confiance, à la fois en soi-même et en un autre. Cette confiance est un premier pas vers une relation apaisée à soi-même et à l’autre.
Docteur Chloé Blachère
Psychothérapie et psychanalyse à Paris 18è