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La méthode sur laquelle je m’appuie pour travailler consiste à utiliser la question du règlement des séances comme un outil thérapeutique qui dès lors, participe au traitement. Cette méthode prend appui sur Hippocrate, en passant par l’une des chrématistiques proposées par Aristote, le travail, jusqu’aux enseignements de Freud et Lacan, et du fondateur et actuel président du RPH- École de psychanalyse (Réseau pour la psychanalyse à l’hôpital), le docteur de Amorim. C’est une manière de mettre la clinique en priorité devant les moyens financiers qui pourront être engagés par la personne en souffrance.


Ce dispositif permet à des personnes en grandes difficultés financières d’accéder à des soins psychiques. Ce dispositif implique également que le clinicien priorise l’éthique qui guide son travail clinique plutôt que le gain financier issu son travail. Il accueille avec le même soin et travaille avec la même application avec une personne en souffrance qui pourra régler la séance un euro qu’avec celle qui en règlera cent. Et ce parce que le travail d’un clinicien, même s’il importe qu’il puisse vivre correctement de son travail, est de recevoir les personnes qui souffrent et qui ont le désir de se défaire de ce qui les fait souffrir. Telle est sa compétence.


Parce que les soins psychiques sont inaccessibles financièrement pour un grand nombre de personnes, et parce que les services publics spécialisés en psychologie et psychiatrie sont saturés et incapables d’honorer toutes les demandes qui leur sont adressées, la réponse sociétale est d’en favoriser la prise en charge, tant par la sécurité sociale que par les mutuelles. Sans même évoquer la dette publique, pourtant bien connue, qu’une telle réponse contribue à aggraver, l’effet psychique que produit la prise en charge financière d’un soin psychique par un autre, cet autre pouvant être représenté par une institution telle que la sécurité sociale ou une mutuelle, n’aide pas un être à grandir et à régler ce qui le fait souffrir. C’est, au contraire, une manière de le déresponsabiliser de sa propre souffrance et de l’asseoir dans une position de victime dont il lui sera d’autant plus difficile de sortir.


Ainsi, plutôt que de rendre inaccessible le soin psychique comme c’est le cas pour certaines personnes qui ne peuvent pas se permettre de régler les honoraires présentés par la plupart des praticiens en ville, je propose aux personnes qui viennent me rencontrer de régler les séances en fonction de leurs possibilités financières et de la valeur qu’elles accordent à leur parole (1), la visée étant que cela leur demande un effort, sans les mettre en difficulté. C’est donc le contraire d’un sacrifice. Cela est explicité de cette manière lors de la première séance. Cette technique a pour but d’engager le patient avec sa parole, à hauteur de ses possibilités financières. Lorsque cette technique est saisie par le patient, elle produit un effet psychique subjectivant important.


Dès lors, répondre favorablement à la demande que formulerait un patient (en psychothérapie) ou un psychanalysant (en psychanalyse) en lui fournissant des factures reviendrait à quitter la position de clinicienne pour laquelle cette personne est venue me consulter.


En effet ce que les personnes souhaitent lorsqu’elles me font la confiance de m’adresser leur souffrance, c’est d’aller mieux, pas d’obtenir des factures pour être remboursées via leur mutuelle. Pour honorer la confiance que ces personnes m’accordent, la position éthique qu’est la mienne, je la construis jour après jour par mon effort quotidien à poursuivre ma formation et à améliorer ma pratique, notamment en participant à des groupes d’études, en en animant d’autres, en faisant superviser mon travail, de manière individuelle et en groupe, en réalisant une thèse de doctorat à l’université, en poursuivant ma psychanalyse personnelle, en intervenant régulièrement et en prenant la parole dans des colloques, des séminaires, en lisant les publications passées et actuelles, en publiant des articles dans des revues scientifiques, en rendant compte de mon travail à mes pairs, ou encore en adaptant mes honoraires aux possibilités des personnes qui viennent me rencontrer.


Les mécontents prennent le temps de publier des commentaires négatifs sur internet ou de faire un « signalement du consommateur » pendant que les autres, désirants, sont au travail de la résolution des souffrances psychiques qui les ont conduits à rencontrer un clinicien. Les agissements des premiers interrogent la position dans laquelle patients et professionnels de santé tendent actuellement à être mis. Un clinicien ne reçoit pas des donneurs d’avis ou des consommateurs. Il reçoit des patients, c’est-à-dire des êtres qui souffrent et qui ont le désir de ne plus souffrir. C’est précisément pour sortir de cette logique de consommation que le refus de faire des factures est un acte clinique.


(1) Cette technique a été mise en place par le docteur de Amorim, psychanalyste, fondateur de la CPP (Consultation publique de psychanalyse),

https://www.rphweb.fr/details-pourquoi+le+paiement+des+seances+en+psychanalyse+est+important-10.html;

https://www.fernandodeamorim.com/details-les+tarifs+de+consultation-473.html




Chloé Blachère
Psychothérapie et psychanalyse à Paris 18è